Villages néo-médiévaux
Présentation générale
Notre projet vise, à terme, à créer un réseau de villages néo-médiévaux qui formera une nouvelle Arche de Noé, permettant à l’humanité de survivre à l’effondrement à venir, et même de préserver les connaissances lorsque celui-ci adviendra.
Le défi à relever est important. Un tel projet demande de toucher à un grand nombre de domaines qui nécessitent des connaissances techniques spécifiques : droit, techniques de construction, environnement, agriculture, etc. Il y a un important travail de documentation à réaliser en amont. Cela vaut également pour la gestion des relations sociales, afin que les volontaires puissent se faire confiance et que les conflits puissent être résolus par des arbitres reconnus pour leur justice et leur impartialité.
Le premier village sera établi en France puisque c’est notre pays d’origine et que s’établir dans un autre pays décuplerait les démarches administratives nécessaires, mais une fois qu’il sera établi, nous comptons créer des franchises à l’internationale. Compte tenu de la composition démographique de la France, il est probable que le premier village soit chrétien, mais il pourrait être intéressant d’y ouvrir également un village musulman.
La France est l’un des pays les plus brutaux envers les communautés alternatives, nous devons nous attendre à un harcèlement juridique et policier, ce qui nous impose d’être absolument irréprochables du point de vue de la loi en vigueur. C’est d’autant plus vrai que notre démarche a une base spirituelle, ce qui nous vaudra sans doute d’être perçus par certains comme une « secte » dangereuse.
Cela dit, l’établissement de communautés alternatives n’est pas quelque chose de réellement nouveau dans l’histoire de l’humanité. Nous pouvons citer les écovillages, le socialisme utopique, les kibboutzim, ou encore les Amish. Ce genre de projet a été mené à bien encore et encore, cela n’a rien d’insurmontable.
Le village ne sera pas fermé sur lui-même, il constituera une vitrine de notre mode de vie. Tous ceux qui voudront y séjourner seront les bienvenus. Nous devrons mettre en place un chalet d’invité ou un dortoir. Ils pourront participer à la vie du village, comme le jardinage ou les travaux. De plus, nous organiserons régulièrement de grandes fêtes pour permettre à un maximum de gens de découvrir ce que nous proposons.
Nous pourrons également y continuer nos recherches, par exemple en techniques agricoles ou de construction, mais également en constituant une bibliothèque, un laboratoire d’alchimie, etc.
Montage juridique et financier (en France)
Nous avons réfléchi à la question de l’organisation juridique et financière de l’achat des villages. Nous avons identifié deux risques principaux que nous avons cherché à éviter au maximum. D’une part, que l’existence du village puisse être remise en cause par une décision individuelle. D’autre part, que les personnes investissant des sommes importantes ne courent un risque élevé de voir disparaître le capital investi. Le montage qui suit nous a semblé satisfaisant.
Pour l’achat du terrain, nous allons créer une SCI (Société Civile Immobilière). Il s’agit d’une personne morale à part entière qui permet la mise en commun de capitaux et nous permettra d’acquérir une propriété foncière. Ce sera elle qui sera propriétaire du village et non les personnes à titre individuel, qui posséderont plutôt des parts sociales dans la société. Cela permet de garantir un fonctionnement à la fois sécurisé et flexible.
Les premiers habitants du village devront sans doute avancer des sommes relativement importantes — plusieurs milliers d’euros —, ce qui se traduira en parts sociales, c’est-à-dire que chaque habitant sera « propriétaire » de la SCI à hauteur du capital investi. On ne possèdera pas directement le village, on possèdera la SCI qui, elle, possèdera le village.
Si un habitant veut quitter le village pour une raison ou une autre, il pourra le faire en vendant sa part, ce qui lui permettra de partir sans chambouler l’organisation du village. Personne n’est prisonnier du projet et on ne voit pas son argent disparaître. Les personnes susceptibles d’être intéressées pour rejoindre le village seront contactées pour remplacer la personne en départ.
Bien entendu, il est essentiel que le village soit intégré au sein d’un réseau plus vaste afin d’avoir une liste de personnes à contacter. Cela renforce encore l’intérêt d’avoir un chalet d’invités ; ceux qui auront visité et seront séduits pourront s’inscrire sur la liste d’attente pour un village ou un autre.
De plus, si le projet finit par échouer pour quelque raison que ce soit, le bien immobilier serait remis en vente, permettant idéalement à chacun de récupérer le capital initial, ou au moins une partie. Ici encore, les risques sont minimisés.
Pour minimiser les risques, la SCI n’empruntera rien aux banques. Toutes les transactions se feront argent comptant. Cela présente également un avantage doctrinal, puisque l’usure constitue un péché grave et l’une des principales racines de la déviation moderne à un niveau « pratique ».
La SCI aura uniquement pour fonction d’assurer la propriété du village d’un point de vue juridique. Le reste de son fonctionnement serait assuré par une association, à laquelle la SCI prêterait son terrain à titre gratuit. C’est-à-dire que ce serait à l’association de dire qui habite où, comment tel terrain est exploité, etc.
Il ne s’agirait pas de l’association vériste générale mais d’une autre. Les missions sont trop différentes et il serait préférable que chaque village ait un contrôle direct sur ses finances et son propre fonctionnement sans passer par des instances plus générales. Ainsi, chaque village se dotera de sa propre association.
Il est probable que nous faisions une levée de fonds pour acheter le bien immobilier où chacun pourra donner même sans vouloir devenir fondateur. L’argent levé ira dans les comptes de l’association et lui permettront de participer à la SCI. À terme, si le village s’avère rentable, l’association rachètera progressivement les parts sociales des habitants jusqu’à devenir l’unique propriétaire du bien, suite à quoi la SCI sera dissoute. L’association passera d’usagée à propriétaire du village et ce sera comme si les fondateurs n’avaient rien dépensé.
Tout cela vaut au niveau du droit français. En ce qui concerne la fondation de villages dans d’autres pays, il nous faudra nous pencher sur le droit en vigueur afin d’y trouver des équivalents.
Estimations
Tout projet sérieux se doit d’être chiffré ; c’est ce qui différencie les simples rêveries des plans rationnels. Vouloir ouvrir des villages est un début, mais concrètement, qu’est-ce que cela représente ? Pour donner des contours un peu plus nets à cette idée, il nous faut connaître deux variables. D’abord, le nombre de personnes que cela inclurait dans le projet, et ensuite, le prix de ce genre de bien immobilier. À partir de ces quantités, des calculs simples nous donneront tout le reste.
Nous allons arrondir de manière pessimiste afin d’éviter de tomber dans le biais de planification. Nous ne présentons donc pas un scénario idéal, au contraire ; nous partons du principe qu’il y aura de mauvaises surprises et que pour faire des prédictions réalistes, il faut prévoir le pire. Nul doute que nos estimations seront donc moins « vendeuses » que ce qu’elles auraient pu être si nous avions suivi les codes habituels, qui tendent à la malhonnêteté, mais la rationnalité et la transparence sont pour nous des valeurs fondamentales.
Pour ce qui est de la démographie, nous pouvons prendre une fourchette. Dans le domaine de la préservation des espèces, la médiane en termes de population minimale viable est de 4 169 individus.1 En arrondissant, cela donne environ 5 000 personnes. Cela nous donne donc une idée de la démographie minimale à atteindre. Cependant, nous ne voulons pas seulement survivre mais prospérer. Le nombre de 144 000 donné par l’Apocalypse de Jean, bien que hautement symbolique, semble plus proche de ce que nous recherchons. On peut donc dire que notre objectif démographique se situe entre 5 000 et 144 000 personnes, le premier représentant le seuil minimum et le second le seuil idéal.
Compte tenu du fait que la population mondiale est actuellement de 8,2 milliards, ce sont des quantités raisonnables. Le seuil idéal ne représente que 0,002 % des personnes actuellement en vie, soit une personne sur 57 000. D’autres groupes faisant des demandes importantes à leurs membres, comme les Mormons et les Témoins de Jéhovah, comptent plusieurs millions de membres (17 et 9 millions respectivement) ; le nombre de l’Apocalypse ne représente qu’une petite fraction de telles quantités. Même la Famille, une « secte » parisienne relativement obscure, compte 4 000 membres. Bien entendu, cela ne signifie pas qu’il sera trivial de l’atteinde ; après tout, il s’agit de la barre supérieure de la fourchette.
Pour ce qui est du prix, un projet documenté de village alternatif2 avait trouvé un bien immobilier de 1,4 ha (14 000 m²), sur lequel se trouvaient quatre bâtiments en ruines dont trois maisons, pour le prix de 35 000 €. Ils estimaient pouvoir y faire vivre 12 personnes en autosuffisance, ce qui est raisonnable. En nous renseignant auprès d'autres communautés alternatives, le prix moyen semble bel et bien correspondre.
Nous partons du principe que ce prix est représentatif de ce genre de bien immobilier en France, à savoir des villages abandonnés. Il est possible que nous devions payer plus cher pour certains villages, mais également moins cher pour d’autres, notamment dans des pays plus pauvres ou lors d’opérations où des villages sont vendus pour 1 € symbolique. Ce prix nous semble donc être une bonne base pour faire une estimation de Fermi.
Avec ces données, nous pouvons donc considérer que l’acquisition du bien immobilier pour la fondation d’un village médiéval demanderait un investissement de 3 000 € par personne. Il s’agit d’une somme très raisonnable, bien inférieure à celle correspondant à l’acquisition d’une propriété plus classique et susceptible, au pire des cas, d’être facilement débloquée par un prêt à la consommation.
(Cependant, il faut garder en tête que les prêts à la consommation ont des taux d’intérêts très hauts. Nous recommandons aux personnes intéressées de mettre de l’argent de côté plutôt que d’avoir recours à ce genre de « services ».)
De plus, compte tenu de la fonction de Dunbar, nous pouvons considérer que la taille idéale d’un village serait entre 120 et 240 personnes, afin que tout le monde puisse s’y connaître. Il est vrai que la fonction de Dunbar présente certains problèmes méthodologiques, mais il s’agit simplement ici de faire une estimation dans les grandes lignes, alors ce sera suffisant. Si l’on considère que le prix augmente de manière linéaire, cela donnerait entre 350 000 € et 700 000 € par village, ce qui est le prix de nombreuses maisons conventionnelles.
Pour le seuil minimal de 5 000 personnes, il faudrait donc acquérir environ 30 villages pour 15 millions. Bien que cette somme soit relativement élevée, il faut garder à l’esprit que répartie sur autant de personnes, elle ne représente toujours que 3 000 € par tête.
Pour le seuil idéal de 144 000 personnes, il faudrait environ 800 villages. En pratique, il y en aura sans doute un peu moins parce que certains villages seront plus gros que les autres, mais ce sera sans doute quand même proche de ce nombre. Le coût total est estimé à 420 millions. Si l’on arrondit de manière pessimiste à 500 millions, alors le coût par tête monte à 3 500 €, ce qui est un changement relativement léger. Cette marge de 80 millions est raisonnable compte tenu du fait que plus un projet est grand, plus les risques de coûts imprévus augmentent.

1. Minimum viable population size: A meta-analysis of 30 years of published estimates (archive).
2. [Officiel] Lancement du village 18-25 (archive). Nous avons aussi largement repris leurs travaux sur le montage juridique.