Vérisme

100 films les plus populaires

Document technique publié le 20/03/2025.

Table des matières

Objectif et méthode

Pourquoi est-ce que les classements des films les plus populaires se basent sur leurs revenus brutes au cinéma ? C’est assez contre-intuitif. Si l’on demandait à quelqu’un de trouver une méthode de calcul pour classer les films par popularité, nul doute qu’il en trouverait une très différente.

Cette méthode a les problèmes suivants :

Si l’on modifie la méthode de calcul pour y intégrer ces variables, on en arrive à la conclusion qu’il serait beaucoup plus juste et honnête de classer les films en fonction de la proportion de la population états-unienne qui est allée les voir au cinéma. Comme ça, les films sont réellement classés en fonction de leur capacité à séduire leur public.

Pourquoi est-ce qu’un tel classement n’avait jamais été fait ? Étant donné qu’il y a beaucoup d’ntérêts en jeux, aussi bien pour l’argent d’Hollywood que pour le soft-power états-unien en général, on peut suspecter que c’est parce que les résultats sont gênants pour eux à un niveau ou un autre.

Nous avons pris un classement des 300 films qui ont fait les plus gros chiffres brutes selon Box Office Mojo (un site annexe à IMDB), datant de 2019. Nous avons pris les revenus indiqués et les avons divisés par le prix moyen d’un billet de cinéma leur année de sortie pour avoir un nombre approximatif de ventes, puis nous avons divisés les résultats par la population états-unienne de l’année de sortie pour avoir un ratio, qu’il suffisait ensuite de multiplier par 100 pour obtenir un pourcentage.

La formule est donc la suivante : [(revenus du film / prix d’un ticket) / population] x 100

Toutes les données sur la population des États-Unis après 1950 viennent de MacroTrends ; celles d’avant 1950 viennent de Demographia. Les prix des billets jusqu’à 2020 viennent de Box Office Mojo (quand une année manquait, je prenais celle d’avant), et ceux des années suivantes de The Numbers.

Nous avons rajouté un petit nombre de films qui n’étaient pas sur la liste d’IMDB et pour lesquels nous avons pu trouver des données de box office claires, chose assez rare en vérité. Il est certain qu’il y a eu des oublis et que cette liste n’est que préliminaire, étant encore biaisée par les choix d’IMDB, mais bon, il faut bien commencer quelque part. Les films en question sont marqués d’un astérisque pour les différencier des autres.

Une petite note sur le calcul des billets vendus pour Naissance d’une nation : 5,2 millions ont été distribués aux actionnaires, et à l’époque, les lois locales fixaient l’argent distribué aux actionnaires à 10 % des revenus, ce qui indique donc des profits de 52 millions. Cependant, comme les cinémas ne déclaraient pas tous leurs revenus, on peut estimer que les revenus réels étaient supérieurs à 60 millions. Wikipédia indique que les billets ont été vendus à un prix « premium » de 2,20 $ pendant 44 semaines dans un cinéma de New York. On peut donc considérer que, durant les 164 autres semaines où le film était au cinéma (pour un total de quatre ans, de 1915 à 1919), le prix était plus proche de la moyenne de l’époque, soit 0,07 $. On considère que la distribution est uniforme dans la durée.

L’équation utilisée pour retrouver le nombre de tickets est : 2,20 x (44 x tickets / 208) + 0,07 x (164 x tickets / 208) = 60 millions

Le classement d’IMDB est assez « étrange » dans la mesure où les résultats ne correspondent pas du tout à ce qui a été annoncé. La méthode qui est présentée sur la page consiste à diviser les revenus du film par le prix d’un ticket de cette année-là, mais quand on essaye de refaire les calculs soi-même, on obtient des résultats très différents. Par exemple, il est indiqué que Bambi a rapporté 102 247 150 $ et que ça correspond à 63 712 400 billets, ce qui reviendrait à un prix moyen de 1,60 $ le billet, alors que IMDB indique clairement qu’en 1942 (année de sortie de Bambi), le prix d’un billet était de 0,27 $, ce qui est six fois moins.

En réalité, cela n’est pas si étrange dans la mesure où IMDB appartient à Amazon et fait donc partie de la « pieuvre ». On peut s’attendre à ce qu’il défende non seulement les intérêts de l’industrie, mais ceux des États-Unis en tant que super-puissance, pour qui le « soft power » a un caractère stratégique d’une importance majeure.

Top 100

  1. Autant en emporte le vent (1939) : 667,23 %
  2. Blanche-Neige et les Sept Nains (1937) : 574,19 %
  3. Bambi (1942) : 280,81 %
  4. Pinocchio (1940) : 265,71 %
  5. Fantasia (1940) : 229,11 %
  6. Cendrillon (1950) : 136,55 %
  7. La Belle et le Clochard (1955) : 129,09 %
  8. Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse (1921) : 120,88 %
  9. 101 Dalmatians (1961) : 117,25 %
  10. Naissance d’une nation* (1915) : 110,29 %
  11. Star Wars (1977) : 95,96 %
  12. Peter Pan (1953) : 93,71 %
  13. Ben-Hur (1959) : 84,19 %
  14. La Mélodie du bonheur (1965) : 83,14 %
  15. Les Dix Commandements (1956) : 79,85 %
  16. E.T., l’extra-terrestre (1982) : 64,91 %
  17. L’Exorciste (1973) : 63,47 %
  18. Le Livre de la Jungle (1967) : 61,00 %
  19. Les Dents de la Mer (1975) : 60,03 %
  20. Mary Poppins (1964) : 58,72 %
  21. La Belle au bois dormant (1959) : 58,37 %
  22. Le Docteur Jivago (1965) : 58,31 %
  23. Titanic (1997) : 52,74 %
  24. Fenêtre sur cour (1954) : 51,64 %
  25. Le Tour du monde en 80 jours (1956) : 51,20 %
  26. Sergent York (1941) : 49,06 %
  27. Star Wars : L’Empire Contre-Attaque (1980) : 48,39 %
  28. Les Plus Belles Années de notre vie (1946) : 47,79 %
  29. Le Lauréat (1967) : 45,13 %
  30. Les Robinsons des mers du Sud (1960) : 44,91 %
  31. Sous le plus grand chapiteau du monde (1952) : 44,41 %
  32. Les Cloches de Sainte-Marie (1945) : 43,56 %
  33. Star Wars : Le Retour du Jedi (1983) : 42,62 %
  34. L’Arnaque (1973) : 42,51 %
  35. My Fair Lady (1964) : 41,66 %
  36. Duel au soleil (1946) : 41,24 %
  37. 20 000 lieux sous les mers* (1954) : 39,61 %
  38. Les Aventuriers de l’arche perdue (1981) : 39,56 %
  39. Le Parrain (1972)  : 38,67 %
  40. La Tunique (1953) : 38,60 %
  41. Le Roi Lion (1994) : 38,56 %
  42. Jurassic Park (1993) : 37,60 %
  43. Grease (1978) : 37,26 %
  44. Cléopâtre (1963) : 36,81 %
  45. Les Gladiateurs* (1954) : 36,521 %
  46. La Conquête de l’Ouest* (1962) : 36,516 %
  47. Butch Cassidy et le Kid (1969) : 36,41 %
  48. West Side Story (1961) : 35,65 %
  49. Psychose (1960) : 35,61 %
  50. Lawrence d’Arabie (1962) : 35,58 %
  51. Love Story (1970) : 34,27 %
  52. Star Wars : Le Réveil de la Force (2015) : 34,23 %
  53. Star Wars : La Menace fantôme (1999) : 33,46 %
  54. Spartacus* (1960) : 33,39 %
  55. Opération Tonnerre (1965) : 33,19 %
  56. Le Kid* (1921) : 32,90 %
  57. Avatar (2009) : 32,87 %
  58. Les Fausses Pudeurs* (1945) : 32,67 %
  59. Le Pont de la rivière Kwaï (1957) : 32,58 %
  60. Airport (1970) : 32,36 %
  61. American Graffiti (1973) : 31,34 %
  62. Ghostbusters (1984) : 30,97 %
  63. Le shérif est en prison (1974) : 30,56 %
  64. Ouragan sur le Caine (1954) : 30,55 %
  65. Forrest Gump (1994) : 30,14 %
  66. Le Flic de Beverly Hills (1984) : 30,02 %
  67. Monsieur Smith au Sénat* (1939) : 29,90 %
  68. La Tour infernale (1974) : 29,64 %
  69. Un monde fou, fou, fou, fou (1963) : 29,52 %
  70. Goldfinger (1964) : 29,33 %
  71. Avengers : Endgame (2019) : 28,50 %
  72. Rencontres du troisième type (1977) : 28,14 %
  73. American College (1978) : 27,77 %
  74. Maman, j’ai raté l’avion ! (1990) : 27,23 %
  75. À travers l’orage* (1920) : 26,84 %
  76. Tootsie (1982) : 26,4 %
  77. Cours après moi shérif (1977) : 26,4 %
  78. Superman (1978) : 26,4 %
  79. M.A.S.H. (1970) : 26,3 %
  80. The Rocky Horror Picture Show (1975) : 26,1 %
  81. Batman (1989) : 25,85 %
  82. Rocky (1976) : 25,81 %
  83. Independence Day (1996) : 25,75 %
  84. L’Homme au masque de cire (1953) : 25,46 %
  85. Tom Sawyer* (1973) : 25,54 %
  86. Retour vers le futur (1985) : 25,23 %
  87. Vol au-dessus d’un nid de coucou (1975) : 25,16 %
  88. Avengers (2012) : 24,73 %
  89. The Dark Knight (2008) : 24,39 %
  90. Devine qui vient dîner… (1967) : 24,37 %
  91. L’Adventure du Poséidon (1972) : 24,24 %
  92. Shrek 2 (2004) : 24,17 %
  93. Spider-Man (2002) : 24,10 %
  94. Jurassic World (2015) : 23,84 %
  95. Spider-Man: No Way Home* (2021) : 23,78 %
  96. 2001, l’Odyssée de l’espace (1968) : 23,61 %
  97. Black Panther (2018) : 23,14 %
  98. Indiana Jones et le Temple maudit (1984) : 23,00 %
  99. King Kong* (1933) : 22,75 %
  100. Les Canons de Navarone (1961) : 22,80 %

Note sur les résultats

On peut considérer que le top 10 est biaisé par le fait qu’au début du XXème siècle, le seul moyen de voir un film était d’aller au cinéma, ce qui fait qu’il était courant qu’une même personne aille voir le même film plusieurs fois. Autant en emporte le vent est resté en salles plusieurs années. Que le classement soit dominé par les grosses productions des années 1910 – 1920 – 1930 n’est donc pas très significatif. Cela dit, c’était également prévisible est c’est un bon signe quant à l’efficacité de la méthode choisie. Si ça n’avait pas été le cas, ça aurait été le signe qu’il y avait un problème quelque part.

Le reste de la distribution est bien plus neutre, contenant des films d’un peu toutes les décennies, comme on pouvait d’ailleurs s’y attendre. Si l’on élimine tous les facteurs qui biaisent le classement en faveur des films modernes, on se retrouve effectivement avec un classement beaucoup moins biaisé.

Il y a une dizaine de films datant d’après les années 2000, ce qui est quand même respectable car c’est un classement dans lequel il est difficile de se hisser. Cependant, il n’y en a aucun dans le top 50 et ils bénéficiaient de budgets et de campagnes marketings considérables. Avengers est arrivé après Vol au-dessus d’un nid de coucou, Avengers : Endgame après Goldfinger (un James Bond), Avatar après Le Kid (le film qui a fait la célébrité de Charlie Chaplin), et Star Wars VII après Love Story. L’impression dominante est loin de la croissance exponentielle telle que présentée dans les médias mais au contraire une industrie qui a du mal à se renouveler et à capter l’attention du public en dépit de budgets de plus en plus boursouflés et d’un martèlement publicitaire constant. Le seul point sur lequel elle a réellement progressé est sans doute sa force de projection à l’international.